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Juil 5 24

S’aimer en cachette au travail peut justifier un licenciement pour faute grave

L’obligation de loyauté est-elle plus importante que le respect de la vie privée ?

Oui, selon la Cour de cassation qui a considéré qu’un DRH avait manqué à son obligation de loyauté en dissimulant à son employeur sa relation intime avec une salariée titulaire de mandats de représentation syndicale et du personnel. Ce manquement à l’obligation de loyauté justifie donc le licenciement pour faute grave du DRH (Cass. soc., 29 mai 2024 n°22-16218).

L’obligation de loyauté découle de l’article 1222-1 du Code du travail. Ce texte dispose que « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi ».

Cette règle découle de deux dispositions du Code civil :

Article 1104 du code civil :

« Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d’ordre public. »

Article 1194 du code civil :

« Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi. »

Il n’est donc pas nécessaire que cette obligation soit mentionnée dans le contrat de travail car elle est d’ordre public.

Cette obligation comprend un devoir de fidélité, de confidentialité et de non-concurrence. L’obligation de loyauté doit être respectée tout au long de la durée du contrat de travail mais également, dans certains cas, après la cessation du contrat. Pour les salariés, son non-respect est passible de sanctions disciplinaires.

Dans notre affaire, le DRH a été licencié pour faute grave (sanction disciplinaire) pour avoir manqué à son obligation de loyauté en dissimulant à son employeur sa relation intime avec une salariée titulaire de mandats de représentation syndicale et du personnel.

Ce qui est reproché au salarié s’est de s’être abstenu d’informer son employeur de sa relation de couple avec une salariée titulaire de mandats de représentation syndicale et du personnel. Car cette relation plaçait le DRH « dans une situation manifeste de conflit d’intérêt entre la défense des intérêts de l’entreprise et les légitimes intérêts qu’[il portait à sa] conjointe » selon la lettre de licenciement.

L’employeur avait évoqué qu’au cours de cette relation avec cette salariée, celle-ci :

  • s’était investie dans des mouvements de grève ;
  • qu’elle avait participé avec le DRH à diverses réunions lors de la mise en œuvre d’un projet de réduction d’effectifs.

En somme, il est préjugé de l’incapacité du DRH à exécuter correctement ses obligations contractuelles au seul motif de cette relation intime. Car, aucun dysfonctionnement, ni aucune anomalie, n’a été évoqué par l’employeur du fait de cette relation. Aucun préjudice donc.

Or, selon la jurisprudence, le manquement à l’obligation de loyauté doit être subordonnée à l’existence d’un préjudice (Cass. soc., 12 oct. 2011, n°10-16.649). Rien de tel dans notre affaire.

Cela laisse entendre que c’est la perte de confiance de l’employeur envers un salarié qui aurait motivée les juges à valider le licenciement. Là encore il y a un problème, car ce motif ne peut pas justifier un licenciement, l’employeur ne pouvant se contenter d’apparences ou d’impressions (Cass. soc., 29 mai 2001, n°98-46.341).

Du reste, le droit au respect de la vie privé, énoncé à l’article 9 du Code civil et invoqué par le DRH, a été balayé. Ce droit permettait pourtant d’avoir le droit de ne rien dire sur sa vie intime.

Est-on en train d’assister à une conception invasive de l’obligation de loyauté dans les relations amoureuses entre salariés ?